
Même s’il n’est plus obligatoire depuis février, le télétravail a incité bon nombre d’entreprises à revoir leur organisation et les salariés à repenser leur existence. L’avenir est sans doute à ce que les économistes appellent le « travail hybride », point d’équilibre, disent-ils, entre le présentiel et le distanciel, le nomadisme et le sédentarisme et, par extension, entre vie professionnelle et personnelle.
En biologie, il se définirait par le croisement de deux espèces. Dans le jargon automobile, par l’association efficiente d’un moteur thermique et d’un bloc électrique. En quelques mois, le monde de l’entreprise a lui aussi appris à faire entrer le terme « hybride » dans le champ de sa dialectique. Mieux encore, il s’est pris au jeu d’une nécessaire remise en question sur l’organisation même du travail et le bien-être de ses forces vives.
La Covid-19 est passée par là, bouleversant l’ordre établi, incitant ici les salariés à prendre du recul sur leurs priorités, là les dirigeants à redéfinir tout à la fois leurs pratiques managériales et leurs politiques de prévention de la santé au travail. L’hybridation, autrement dit la recherche d’un équilibre optimal entre télétravail et présence au bureau, a ainsi fait son nid, interrogeant sur l’aptitude, mais aussi l’intérêt des uns et des autres à la privilégier et à la mettre durablement en valeur. Pour Jean-Luc FOURRÉ, président du groupe ANDRH Poitou-Charentes, « la crise sanitaire a avant tout agi comme un accélérateur de mouvement ». « La qualité de vie au travail, souligne-t-il, on en avait déjà une approche évolutive. La démocratisation du télétravail n’a pas engendré de bouleversement profond, mais elle a suscité, c’est une évidence, une vraie prise de conscience. Elle a fait évoluer les mentalités des salariés et des dirigeants et repositionné le curseur sur les actions à engager pour accompagner au mieux la nouvelle organisation qui se fait jour dans de nombreux secteurs. »
Pas tous ? Là encore, le DRH se veut nuancé. « Dans l’industrie, on est revenu au fonctionnement d’avant-pandémie. Dans le tertiaire, en revanche, on est à un virage important, tant en matière d’organisation interne que de dynamique de recrutement. Prenez l’exemple des centres d’appels. Grâce à eux et au télétravail, un nouveau champ des possibles s‘ouvre pour les personnes sans permis, sans moyen de locomotion, sans argent pour faire garder leurs enfants. A l’inverse, parce qu’elle est 100% télétravaillable, cette activité peut très bien faire l’économie de la location ou de l’achat de bureaux. La libération de l’espace, c’est de l’argent gagné pour l’employeur. Notamment dans les grandes villes où l’immobilier est cher. »
Pour les CRC comme pour l’ensemble des entreprises recourant, totalement ou en partie, au travail à distance, une constante s’impose : les pratiques managériales doivent se réinventer pour épouser la plus fondamentale des exigences, celle de veiller au bien-être des salariés. Nous verrons dans les pages suivantes que plusieurs pistes de réflexion sont à explorer.